Source : Alain PEYRACHE
Conclusion
 
« Un maître, un dojo »
Cette conception traditionnelle du dojo, si elle n’a rien à voir avec ce qui se fait dans le domaine sportif habituel de l'aïkido fédéral, n’est pas une « japonaiserie » inapplicable dans notre pays. Il n’y a rien, en cela, d’ésotérique, de mystique ou de purement oriental. A bien y regarder, cela ne s’apparente-il pas tout simplement au fonctionnement quotidien de toute entreprise, tel que nous pouvons l’observer autour de nous ?
Pour autant, on l’aura compris au travers de ces développements, la qualité première d’un pratiquant d'aïkido, maître ou élève, est le jugement.
Pour le maître, car il lui garantit la qualité des personnes dont il s’entoure et auxquelles il professe un enseignement martial.
Pour l’élève, car il lui permet de choisir son maître, donc son dojo, en toute liberté et de se construire dans un environnement certes hiérarchisé mais auquel il a décidé de lui-même d’adhérer. Sa liberté s’en trouve, paradoxalement, affirmée.
Au niveau du professeur
 
1. Celui qui commercialise sa pratique
Nous l’avons vu plus haut, un professeur ne transmet pas un enseignement martial à n’importe qui.
Ceci implique qu’un vrai pratiquant d'aïkido ne publie pas de livres ni ne produit de cassettes vidéo dans lesquels il expose son enseignement. Tout au plus une vidéo publicitaire ou des publications anodines, destinées à la promotion de son dojo.
Pour poursuivre l’analogie avec l’entreprise, si vous travaillez pour Machin, vous ne divulguez pas vos secrets de fabrication à la concurrence, vous ne travaillez pas pour cette dernière, sous peine d’être viré pour faute grave.
L'aïkido n’est ni un spectacle, ni un produit de consommation. Il ne se commercialise pas.
 
2. Celui qui ne sait pas quelle est sa place
Formatage culturel occidental oblige, un professeur peut accorder, lui aussi, une importance excessive à son propre grade.
S’il est issu d’un autre dojo, d’une entreprise différente au sein de laquelle il avait un grade, il conserve ce grade car personne ne peut le lui enlever : s’il a été contremaître chez Machin, il pourra dire toute sa vie, « j’ai été contremaître chez Machin ».
Nul ne peut lui retirer cela. Pour autant, lorsqu’il change d’entreprise, sa place dépendra de la volonté du patron qui l’embauche.
Si un enseignant a un grade, c’est qu’il est uchi deshi d’un autre maître, dont il professe l’enseignement et qui est le patron de ses entreprises.
Le fonctionnement interne dépendra donc de ce dernier : « un maître, un dojo ».
Ayant fait un tel choix, l’enseignant est, de fait, d’accord avec son fonctionnement, aucune obligation économique ne l’obligeant à rester. Néanmoins, le développement de l’individu, le « do », fait que nous sommes tous différents et qu’un jour, ce fonctionnement puisse ne plus lui convenir, car commence alors son autonomie, but principal de la pratique. C’est signe qu’il est temps pour lui de créer son propre dojo. Cela peut se faire en créant une succursale de la première entreprise. Celle-ci devient alors plus grande et l’enseignant s’élève dans la hiérarchie.
Cela peut se faire en créant son entreprise et en devenant son propre patron. Il devient alors concurrent de son ancien patron et ne saurait, de ce fait, lui demander de le cautionner. Devenu patron de son entreprise, il n’a, en conséquence, aucun grade.
La conception traditionnelle du dojo
 
Qui veut comprendre le fonctionnement d’un dojo, au sens traditionnel du terme, doit avoir à l’esprit celui d’une entreprise dont le patron, à sa tête, se nommerait « maître » ou « senseï »
2. Analogie avec l’entreprise au niveau du fonctionnement
 
Tout est hiérarchisé au sein d’un dojo, tant la position, les responsabilités et les tâches à accomplir, que les relations entre les acteurs.
Pour poursuivre l’analogie, le patron (le professeur), décide de la place de chacun dans son entreprise (son dojo) : contremaître (ex : 5ème dan), salarié (ex : 5ème kyu).
C’est pourquoi cela n’a aucun sens de donner un grade au professeur ; il n’a aucun poste dans son entreprise puisqu’il en est le patron et décide de la place de chacun.
On l’aura compris, la structure conditionne l’intelligence du milieu et induit la qualité de son fonctionnement. Néanmoins, certains écueils vont inévitablement se présenter, qu’il appartiendra au professeur de surmonter. Car l’une des premières compétences d’un professeur de taïkido est de savoir à qui il transmet un enseignement martial. En effet, l'aïkido n'est pas universel et il ne convient pas à tout le monde. Certains n’ont pas leur place dans un dojo.
Au niveau des élèves
 
1. Ceux qui attachent une importance excessive aux grades
Nous l’avons vu plus haut, donner un grade à un professeur n’a aucun sens puisqu’il est le patron.
Un grade n’est pas une norme régionale, nationale ou internationale indiquant une valeur, une compétence. Rappelons que « dan » signifie « degré », comme les marches d’un escalier et donne la position d’un individu dans l’entreprise (dojo). Ce n’est pas un repère dans la connaissance de l'aïkido et n’aide en rien à se situer dans la progression de cette discipline. Pourtant, combien de personnes pensent-elles le contraire ?
Pourquoi ? Parce qu’on aborde l'aïkido avec notre formatage culturel qui, soit dit en passant, ne demande aucun effort, ni aucune compétence.
Ainsi aboutit-on au paradoxe suivant : des professeurs réputés et des ignorants n’ayant jamais pratiqué l'aïkido portent le même avis sur le grade : un critère de valeur fondé sur un système formaté, occidental, système universitaire, militaire, sportif…
Aussi, afin de satisfaire cette aberrante notion occidentale de grade, va-t-on entretenir cet état d’esprit :
Lors de passages de grades, par exemple, où des jurys jugeront des pratiquants qu’ils ne connaissent pas, exécuter des catalogues de techniques. Des pratiquants désireux d’obtenir un grade lors d’un examen, vont « bachoter » toute l’année pour un mini psychodrame d’un quart d’heure devant un jury. Un grotesque numéro de duettistes qui ne saurait en aucun cas faire valoir de compétence martiale.
Comprenez bien : dans le domaine martial, une technique réussie vous êtes vivant, une technique manquée, vous êtes mort. La technique n’est que le moyen et non l’objectif. Ne pas comprendre cela est la plus grande erreur pédagogique que l’on puisse commettre.
Magnifique constat d’incompétence et d’incompréhension, néanmoins tellement évident et crédible pour un occidental ! Pris en flagrant délit d’ignorance, la personne à laquelle vous ferez part de vos questionnements vous rétorquera qu’on n’est pas au Japon, qu’ici en France, les lois du pays imposent de tels systèmes de grades. Invoquer le fatalisme est une facilité : cela dispense de réfléchir.
Pis encore, on ira jusqu’à prétendre que ce comportement aberrant permet de protéger les foules ignorantes des escrocs de tous poils, qui ne procèdent pas ainsi, et qui ne cherchent qu’à les abuser et les exploiter.
Croire en l’appréciation d’une qualité martiale par des gens que l’on ne connaît pas est absurde. Un pratiquant d’art martial ne se fie qu’à son propre jugement. Une belle carte de visite n’est que le signe que la personne qui vous la présente a les moyens de se payer un imprimeur...
Aux yeux du pratiquant d'aïkido, se livrer à pareille pantomime pour satisfaire à des critères qui n’ont rien de l'aïkido est ubuesque. Cela explique toutefois les tensions et les dires des différentes fédérations, bref, toute l’histoire de l'aïkido en France depuis 50 ans. L'aïkido ne s’apprécie pas à l’aune de critères occidentaux ancrés dans des approches militaires, universitaires ou même sportives.
 
2. Ceux qui ne veulent être l’élève de personne
Il s’agit de ceux qui pensent n’avoir que des droits mais aucune obligation, qui veulent commencer en étant directement « patron ».
Ceux-là ne peuvent être tolérés au sein d’un dojo, au même titre qu’aucun patron n’embauchera un salarié qui refuse de travailler pour lui ou d’obéir à ses ordres.
De même qu’un patron emploie un salarié pour ses compétences. Si les lacunes ou l’incompétence de ce dernier mettent en jeu la réputation, le développement et la vie de l’entreprise, il ne peut que se retrouver très vite à la porte. Il en va ainsi au sein d’un dojo.
 
3. Ceux qui prétendent améliorer l'aïkido
Nous avons parfois à faire à des individus qui, sans jamais avoir appris l'aïkido, voudraient que celui-ci fonctionne selon leurs délires, c’est-à-dire selon leurs propres conceptions de l’administration, de la gestion associative…
Ils commencent par critiquer ce qu’ils voient et prétendent que l’on devrait faire autrement, comme dans d’autres domaines qui n’ont rien à voir avec l'aïkido, tels par exemple le syndicalisme ou les partis politiques.
Cette attitude dénote une haute opinion de soi car, sans connaître la discipline, on prétend l’améliorer en changeant son fonctionnement. C’est ce que l’on qualifie de « misonéisme », à savoir l’incapacité à apprendre quelque chose de nouveau.
Ces individus n’ont rien à faire dans un dojo d'aïkido. Ils passeront leur temps à vouloir dénaturer la discipline pour qu’elle ressemble à ce qu’ils connaissent dans d’autres domaines. A l’instar de l’entreprise, un employé se permettant d’aller expliquer au patron comment il doit gérer son affaire prendra la porte dans l’instant qui suit.
Les comportements déviants dans un dojo
1. Analogie avec l’entreprise au niveau de la structure
 
Les dojos, à l’instar des entreprises, sont de plusieurs natures : il existe des entreprises familiales, dites artisanales, des entreprises à succursales multiples ayant une dimension régionale ou nationale, ainsi que des multinationales.
La structure de base d’un dojo est de type pyramidal, exactement comme toute entreprise.
Cette hiérarchie nous est constamment rappelée, pendant la pratique, si l’on regarde la disposition d’un dojo (voir en bas de cette page).
- le fondateur au sommet (la référence),
- à droite du fondateur, rang inférieur, le senseï du dojo,
- à gauche du professeur, les uchi deshi
- à droite du professeur, les « consommateurs »

Un fonctionnement traditionnel de dojo implique à sa base l'adoption de concepts issus de la culture orientale.

Il diffère donc fondamentalement de celui d'un club sportif

 

Les 2 conceptions courantes mais erronées, du dojo

 

1. Les inspirés

Pour certains, le dojo est un lieu mythique, sacré, l’endroit où, un jour, le pratiquant recevra l’illumination mystique. Poussée à son paroxysme, la notion de dojo s’apparente à celle de l’église pour les chrétiens. La signification des idéogrammes japonais, les saluts, la tenue…, il n’en faut pas plus, à d’autres, pour créer une religion dont ils sont, fonction de leur personnalité, gourous ou disciples.

 

2. Les sportifs

Pour d’autres, au contraire, le dojo n’est autre chose qu’un simple club sportif : on y va pour rencontrer des amis, pratiquer une gymnastique d’entretien susceptible, éventuellement, de faire maigrir ou, le cas échéant, de permettre de se défendre. On y vient pratiquer l’aïkido comme on vient pratiquer du tennis ou du basket.

Voilà, schématiquement, les deux conceptions du dojo que nous trouvons le plus fréquemment dans nos pays occidentaux.

La réalité est pourtant tout autre.

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